Ou plutôt, ne plus se sentir femme. Je crois qu’avec l’apparition de mon fibrome, il a fait disparaitre ma féminité. Il a tout bouleversé, tout emporté avec lui. Je n’étais plus qu’un corps, un amas de chair, d’os, d’organes, de sang, d’oxygène. J’étais tout ça avant d’être une femme.
C’est venu petit à petit. Au fur et à mesure que les symptômes s’installaient, je disparaissais. Je me camouflais derrière des vêtements plus amples, surtout au niveau des pantalons. Il fallait masquer les grosses protections hygiéniques qui faisaient l’effet couche. Adieu slim ou skinny qui font un boule d’enfer… J’avais toujours un pull ou gilet à attacher autour de mes hanches si j’avais une tache de sang qui arrivait. Pas très glamour mais à ce stade là, on privilégie le confort à la sexy attitude.
Mon cerveau était branché H24 sur le réseau fibrome, impossible de se déconnecter. J’étais obnubilée par ce sang qui coulait en continu. Je devenais une flippette de la tache de sang, du coup je doublais les culottes, je blindais mes pantalons en mode armure. Au placard les belles lingeries, tangas ou strings. Au mieux, je les sortais l’unique jour où je pouvais espérer avoir un rapport sexuel. Mais qui disait rapport disait aussi remettre vite une grosse culotte blindée illico presto après car ça déclenchait des saignements après…
Alors, vous allez me dire que la féminité ne se résume pas à de la belle lingerie et vous avez raison. Mais au delà des strings, c’est toute une confiance en soi qui est mise à mal avec les fibromes. Ne plus avoir sa sexualité « normale », ne plus se reconnaitre au lit (car on va forcément penser aux saignements d’après), ne plus réussir à lâcher prise, se sentir moche, voir sa libido diminuer…
Se sentir « handicapée » dans les yeux de son amoureux, se dire qu’il ne me connait que comme ça (notre relation a débuté avec l’apparition des fibromes), qu’il ne connait pas la Cécile normale, qu’il ne la connaitra peut-être jamais…
Et puis, il y a les échecs des traitements. On reprend de l’espoir à chaque traitement débuté, on y croit, on sourit de nouveau car ça marche un petit peu, on retrouve l’idée qu’on va revivre un peu comme avant et puis non. Non, ça ne marche pas, ça ne marche pas bordel. Encore une fois et encore une fois le moral en prend un coup.
Les traitements hormonaux peuvent aussi déclencher des prises de poids, et, ainsi, modifier son corps, son apparence corporelle. C’est dur de se voir changer, il faut accepter de voir les chiffres de la balance grimper et ne rien pouvoir y faire. Ces mêmes traitements qui peuvent aussi provoquer des dépressions. Comment résister à tout ça, comment accorder encore du temps et de l’énergie à sa féminité ?
Comment encore se sentir femme ?
Je n’y arrivais pas. Je n’étais qu’un corps avec des fibromes.